Environ la moitié des cas récents de comportement toxique découverts chez Ubisoft avaient été signalés auparavant au service des ressources humaines, selon des rapports récents.
Le système des RH d’Ubisoft a été comparé à un mur contre lequel les allégations d’abus s’effondrent depuis des années.
Un article de fond du journal Libération a mis en lumière les dysfonctionnements au niveau des RH de l’entreprise, qui auraient perpétué des comportements toxiques. L’article a été publié juste un jour avant que trois dirigeants d’Ubisoft, dont la responsable mondiale des RH Cécile Cornet, ne démissionnent à la suite de la récente vague d’allégations d’abus sexuels et d’une culture toxique.
Une volonté de diminuer la gravité des situations
Chaque plainte déposée auprès des RH pour comportement toxique, harcèlement ou inconduite sexuelle a été accueillie par des remarques telles que « Ils sont créatifs, c’est comme ça qu’ils travaillent » ou « Si vous ne pouvez pas travailler avec lui, il est peut-être temps que vous partiez », rapporte Libération.
Une employée de haut rang d’Ubisoft qui ne s’identifie qu’au nom de Romane a décrit une réunion au cours de laquelle Cécile Cornet a tenté de « blanchir le nom des RH » et d’éloigner et limiter sa responsabilité dans la crise actuelle.
« Au cours de la réunion, tous les services dont la fonction est de garantir un environnement de travail sûr, la diversité et l’inclusion étaient présents, et on m’a dit qu’ils devaient être dégagés de toute responsabilité », a déclaré l’employée.
Une situation alarmante, de grande ampleur
Un autre appel, qui a eu lieu depuis le début de la crise, a réuni 90 responsables des RH et a été qualifié de « grotesque » par une source anonyme.
Le patron des RH de Montréal est intervenu et a déclaré : « Ces articles sont injustes, et si Yves (Guillemot, le PDG d’Ubisoft) ne partage pas une déclaration publique qui disculpe les RH, c’est simple, je quitterai Ubisoft avec la moitié de mon équipe ». Après cela, tous ses collaborateurs se sont mis d’accord.
Romane a ajouté : « C’était de la folie, nos discussions ont pris une tournure bizarre, un certain nombre de RH se sont placés comme victimes. Même si vous pouvez absolument comprendre que tous les départements des RH ne sont pas coupables d’avoir dissimulé des comportements toxiques, cela constitue tout de même un échec collectif ».
Les dysfonctionnements des RH au studio d’Ubisoft à Montréal ont également été révélés aujourd’hui dans un article du Journal de Montréal. Un ancien employé, par exemple, a déclaré « Travailler sur Far Cry m’a coûté deux burnouts, le harcèlement psychologique et sexuel, et l’humiliation, et les RH n’ont jamais daigné m’écouter ».
Libération s’est entretenu avec un membre du personnel des RH qui a pu lire tous les témoignages d’abus récents, et a rapporté qu’environ la moitié des cas récents avaient été signalés aux RH auparavant. Un quart de ces accusations impliquaient le directeur de la création Serge Hascoët et des membres de l’équipe éditoriale dont il était responsable avant de quitter ses fonctions au début de la semaine.
Une autre source a expliqué que l’approche d’Ubisoft était d’enterrer les problèmes et d’attendre que les choses s’apaisent. En 2015, il y a eu une tentative de créer un code de conduite. Mais il a été édulcoré par les responsables des ressources humaines.
Le code de conduite a également été empêché d’évoquer ce qui se passerait en cas de harcèlement de la part d’un manager, car il a été jugé « trop pessimiste et les employés croiraient alors que cela peut arriver ».